D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu un rapport difficile avec mes cheveux crépus.
Petite, je ne comprenais pas pourquoi ils ne poussaient pas tout simplement, comme ceux de ma sœur qui est…blonde aux yeux bleus ( !). Pour la petite histoire, j’ai été adoptée à la naissance et j’ai grandi dans un environnement familial où je ne me suis jamais sentie différente parce que j’étais la seule Noire. J’étais juste moi, Martine.
Seulement voilà, mes cheveux (bien plus que ma couleur de peau) étaient là pour me rappeler que j’avais ce petit quelque chose d’autre, d’ailleurs. Toutes mes amies avaient les cheveux longs et moi pas. Et ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé !
Je me souviens ainsi de mon tout premier brushing, chez le coiffeur de ma mère et de l’immense joie que j’avais ressentie ce jour-là : j’avais enfin les cheveux longs et raides !!! Le bonheur fût de courte durée car mes cheveux retrouvèrent vite leur état naturel. Devant ma déception, ma mère décida de s’informer sur la façon de les soigner. On lui répondit qu’il fallait acheter des produits spécifiques à Matongé, le quartier africain de Bruxelles. Ma mère s’y rendit et quelle ne fût sa surprise d’être moquée, personne ne voulant croire qu’elle avait un enfant Noir. Elle revint tout de même avec du Beurre de Karité et c’est ainsi que, grâce à elle, j’ai commencé à nourrir mes cheveux.
La suite fut une histoire de rencontres et de déclics :
1er déclic – Ma rencontre avec Sandrina, mon amie d’enfance, d’origine Congolaise comme moi. Cette amitié n’était pourtant pas gagnée car elle se moqua d’abord longtemps de moi et de mes cheveux. Devant mon désarroi, elle décida de faire de moi son cobaye. C’était la première fois qu’on s’occupait de mes cheveux. Tresses, défrisages, tissages, on a tout essayé…pour se rendre compte assez vite que mes cheveux étaient métissés, qu’ils ne supportaient pas les produits défrisants et se cassaient très rapidement. Bref, mes cheveux poussaient très, très lentement et il n’y avait pas grand chose à faire. Je me suis petit à petit fait à l’idée, tout en complexant davantage… Heureusement, il y avait toujours mes parents, mes premiers fans, pour me dire que j’étais jolie, quoi que je fasse !!!
2è déclic – Ma rencontre avec Louise, ma mère biologique. Outre l’émotion de cette journée si particulière, je me souviens avoir dit à Sandrina qui m’accompagnait : « Tu as vu, elle a les cheveux super longs !!! ». L’espoir m’était revenu. Après tout, je tenais pour moitié d’elle ! Louise m’acheta d’autres produits pour assouplir mes cheveux sans les défriser, tout en me conseillant de poursuivre le tissage de mèches, le temps que mes cheveux poussent. Je découvris ainsi les mèches brésiliennes, ces fameuses extensions à base de véritables cheveux. Il me fallut du temps pour trouver mon style, il y a eu d’ailleurs quelques ratés capillaires mémorables comme cette coupe improbable que j’arborais au mariage d’une de mes meilleures amies, Agnès ! Quand je regarde les photos, j’ai juste envie de rire !!! Je me mis donc à alterner les périodes de tissage avec celles où je laissais mes cheveux libres et ô miracle, ils se mirent à pousser petit à petit…
3è déclic – Un moment, plutôt. Celui où j’ai décidé d’arrêter les extensions et de laisser mes cheveux naturels. C’était il y a 3 ans. Je me souviens que toutes mes collègues attendaient mon retour au bureau, impatientes de découvrir ma nouvelle tête. Elles ne furent pas déçues : d’abord lissés au brushing, mes cheveux se transformèrent au fil des jours en un nuage doux et vaporeux. Celui dont j’avais toujours rêvé : je me trouvais enfin jolie !
4è déclic – Malheureusement, à la même époque, un mal insidieux s’était immiscé en moi: l’hypothyroïdie. Et petit à petit, comme dans un cauchemar, je vis mes beaux cheveux tomber les uns après les autres. J’étais prostrée, ne sachant plus quoi faire. Jusqu’à ce jour de septembre 2009 où mon amie Béatrice – ne supportant plus de me voir ainsi- m’accompagna à Matonge, chez un coiffeur pour hommes pour me faire raser la tête. Que dire de ce que j’ai ressenti à ce moment-là…Je ne me souviens plus bien à vrai dire, si ce n’est de cette sensation de black-out total. Je ne remercierai d’ailleurs jamais assez Béa d’avoir été là pour m’aider à traverser cette épreuve…
5è déclic – Le pacte passé avec Béa et sa sœur Marie-Claire, toutes deux d’origine Burundaise, pour laisser dorénavant nos cheveux pousser naturellement. On était drôles toutes les trois avec nos boules à zéro et je dois dire que sans elles, je n’y serai pas arrivée. L’autre fait encourageant est que je n’ai jamais reçu autant de compliments que depuis mon retour au naturel.
Et c’est donc ainsi que je devins, sans le savoir, une Nappy Girl ! C’était il y a deux ans… Quelque part, c’était hier, car il m’a fallu encore tout ce temps pour apprendre à vivre harmonieusement ma nouvelle vie de nappy, sans céder à la tentation du défrisage ou…des extensions.
Me voici donc aujourd’hui en plein apprentissage avec en plus, un blog sur les bras ! Et ce n’est que du bonheur…
Illustration : © Mathilde Bel pour nappyisbeautiful.be / Tous droits réservés ©.
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